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David Homedes

La Paternité de St Joseph


Homélie sur la Sainte famille (dim. 29/12/19)

LECTURES : Vivre ensemble dans le Seigneur (Col 3, 12-21)

Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Colossiens

Frères,     puisque vous avez été choisis par Dieu, que vous êtes sanctifiés, aimés par lui, revêtez-vous de tendresse et de compassion, de bonté, d’humilité, de douceur et de patience.     Supportez-vous les uns les autres, et pardonnez-vous mutuellement si vous avez des reproches à vous faire. Le Seigneur vous a pardonné : faites de même.     Par-dessus tout cela, ayez l’amour, qui est le lien le plus parfait.     Et que, dans vos cœurs, règne la paix du Christ à laquelle vous avez été appelés, vous qui formez un seul corps. Vivez dans l’action de grâce.     Que la parole du Christ habite en vous dans toute sa richesse ; instruisez-vous et reprenez-vous les uns les autres en toute sagesse ; par des psaumes, des hymnes et des chants inspirés, chantez à Dieu, dans vos cœurs, votre reconnaissance.     Et tout ce que vous dites, tout ce que vous faites, que ce soit toujours au nom du Seigneur Jésus, en offrant par lui votre action de grâce à Dieu le Père.     Vous les femmes, soyez soumises à votre mari ; dans le Seigneur, c’est ce qui convient.     Et vous les hommes, aimez votre femme, ne soyez pas désagréables avec elle.     Vous les enfants, obéissez en toute chose à vos parents ; cela est beau dans le Seigneur.     Et vous les parents, n’exaspérez pas vos enfants ; vous risqueriez de les décourager.

    – Parole du Seigneur.

ÉVANGILE

« Prends l’enfant et sa mère, et fuis en Égypte » (Mt 2, 13-15.19-23)

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu

Après le départ des mages, voici que l’ange du Seigneur apparaît en songe à Joseph et lui dit : « Lève-toi ; prends l’enfant et sa mère, et fuis en Égypte. Reste là-bas jusqu’à ce que je t’avertisse, car Hérode va rechercher l’enfant pour le faire périr. »     Joseph se leva ; dans la nuit, il prit l’enfant et sa mère, et se retira en Égypte,     où il resta jusqu’à la mort d’Hérode, pour que soit accomplie la parole du Seigneur prononcée par le prophète : D’Égypte, j’ai appelé mon fils.

    Après la mort d’Hérode, voici que l’ange du Seigneur apparaît en songe à Joseph en Égypte     et lui dit : « Lève-toi ; prends l’enfant et sa mère, et pars pour le pays d’Israël, car ils sont morts, ceux qui en voulaient à la vie de l’enfant. »     Joseph se leva, prit l’enfant et sa mère, et il entra dans le pays d’Israël.     Mais, apprenant qu’Arkélaüs régnait sur la Judée à la place de son père Hérode, il eut peur de s’y rendre. Averti en songe, il se retira dans la région de Galilée     et vint habiter dans une ville appelée Nazareth, pour que soit accomplie la parole dite par les prophètes : Il sera appelé Nazaréen.


Homélie

Tous les ans, après avoir fêté la naissance de Jésus à Noël, le dimanche qui suit, la liturgie nous plonge dans la croissance de Jésus au sein de la sainte famille. Les lectures tournent au tour de la famille.

Cette année, la 2ème lecture est gênante pour notre époque. Saint Paul s’adresse aux familles de son temps. Il exhorte ceux qui ont de l’autorité à utiliser leur pouvoir pour servir et ne pas pour se faire servir. Puis il exhorte ceux qui n’ont pas de l’autorité à être obéissants et ne pas rebelles. C’est très juste. Ce qui nous gêne, c’est que les femmes apparaissent du même côté que les enfants : du côté de ceux qui n’ont pas de l’autorité et qui doivent être obéissants !

C’est un fait, que dans son époque l’autorité est réservée aux hommes et le but de Paul n’est pas de réfléchir sur la pertinence de ce model ou de proposer un autre model de famille. L’objet de sa lettre c’est d’exhorter ceux qui n’ont pas d’autorité à être dociles, et ceux qui ont autorité à profiter de ce pouvoir pour donner à chacun ce dont il a besoin, pour faire grandir et ne pas pour écraser.

L’autorité dans la bible est toujours synonyme de service. Dieu donne du pouvoir à certains, pour qu’ils puissent prendre soin des autres. De fait, le mot « ministre » en grec veut dire « serviteur ». L’autorité politique doit être avant tout un service à la nation.

A chaque fois que les disciples cherchent la grandeur, (Lc 22) Jésus leur rappellera que l’autorité a pour but de mieux servir. A la cène, avant de les ordonner prêtres et évêques, il leur apprend à laver les pieds (Jn 13). Parmi les nombreux titres du pape, celui qui résume tous les autres c’est « servus servorum Dei » (le serviteur des serviteurs de Dieu). La hiérarchie de l’Église est comme une pyramide inversée.

La sainte famille est le model de cette nouvelle forme d’autorité/service. Dieu reconnaît l’autorité de Joseph : c’est à lui qu’il donne les consignes, afin qu’elles soient appliquées par les deux autres. Dieu le Père ne s’adresse pas à Marie ou à Jésus pour leur demander de fuir en Égypte, ou de rentrer après la mort d’Hérode, ou de s’installer à Nazareth.

Joseph assume son autorité alors qu’il est le moins saint de tous les trois ! L’évangile nous dit qu’il était juste, mais il ne dit pas qu’il était l’Immaculée Conception ni le Fils de Dieu. Donc, techniquement, c’est le seul des trois qui peut pécher ! Autrement dit, dès qu’il y avait un problème à la maison c’était toujours sa faute ! Et pourtant, il assume cette autorité qui lui a été reconnue par Dieu lui-même.

Son autorité c’est pour servir et ne pas pour être servi. Autrement dit, pour que chacun puisse être ce qu’il doit être. Il protège la Virginité de Marie et l’anonymat Jésus. Un autre homme n’aurait pas permis à Marie de vivre sa vocation de rester Vierge pour épouser Dieu lui-même. En épousant Marie il la protège d’être lapidée ou d’être épousée par un homme moins respectueux. En adoptant l’enfant de Marie il permet à Jésus d’accomplir les prophéties qui l’annonçaient comme membre de la famille du roi David. Il protège son anonymat par rapport à ses origines divines et il sauve le Sauveur de se faire tuer.

En fin, serviteur au quotidien, Joseph accepte d’éduquer Jésus dans les choses les plus banales de la vie humaine. Le fils de Dieu a voulu mener une vie d’homme normale pendant 30 ans, et Joseph a accepté de lui apprendre un métier, et toutes les choses ordinaires qu’un père apprend à son enfant. Du vivant de Joseph, Jésus ne fera rien d’extraordinaire.

Si notre génération a abandonné le model de famille patriarcale c’est parce qu’il y a eu des abus d’autorité à toutes les époques. Jésus lui-même avait déploré que les puissants de ce monde écrasent les petits au lieu de les faire grandir. Dans les pays de culture chrétienne, il y a eu une prise de conscience de la dignité de la femme au fil des siècles, jusqu’au refus de toute inégalité. La bible nous a fourni tous les ingrédients pour cette prise de conscience qui n’a pas eu lieu dans d’autres civilisations.

Je ne prétends pas qu’il faudrait retourner en arrière. En revanche, je constate que le nouveau modèle de famille ne marche pas, non plus.

Notre époque se caractérise par un nombre considérable d’hommes qui restent toute leur vie dans une immaturité d’adolescent. Combien de familles éclatent parce que le papa achève sa crise d’ado pendant la crise de la quarantaine ! Combien de couples restent ensemble mais c’est la maman seule qui gère vraiment la vie du foyer.

Depuis que la législation facilite le divorce aux femmes, combien de drames cachés sont sortis à la lumière ! Il y en a tellement, que l’inconscient collectif croit de moins en moins à la complémentarité homme-femme dont parle toute la bible. De fait, si des nombreux hommes osent abandonner leur foyer c’est aussi parce qu’ils n’ont pas l’impression d’être indispensables. La théorie du Gender nous offre d’autres modèles de famille dans lesquels l’homme n’est pas indispensable.

Nombreux sont les français qui trouvent dramatique un enfant sans maman, mais qui ne trouvent pas dramatique un enfant sans papa. Nombreux sont les français qui sont contre la Gestation pour Autrui, mais qui sont favorables à ce que la Procréation Médicalement Assistée fabrique des enfants sans papa, tant que l’enfant a une maman (ou deux).

En quoi les hommes sont indispensables ? Jusqu’à il y a un siècle, la plupart des métiers étaient physiques. Les hommes nourrissaient leur famille par la force de leurs bras. A présent, ce sont les diplômes universitaires qui font gagner le plus d’argent. Les femmes n’ont plus besoin d’un homme pour nourrir leurs enfants. Les jeunes garçons apprennent très tôt à réprimer leur côté guerrier et aventurier et à devenir sages comme les filles, qui tiennent plus facilement en place pendant les heures d’école, car c’est les études et ne plus la force masculine, ce qui permet de réussir dans la vie. Aussi bien la société que l’Église éduquent les garçons à abandonner leur côté sauvage.

Et pourtant, je reste persuadé que la masculinité bien orientée, est une force indispensable pour l’Église et pour la société. On pourrait développer plusieurs aspects de cette paternité à retrouver, mais je vais me concentrer le rôle du père qui me semble le plus important : la transmission de la foi !

Cela peut étonner, en quoi les hommes sont indispensables à la transmission de la foi ? Les femmes peuvent le faire aussi. Je vais m’expliquer à partir de 3 constats :

1- La plus grande partie des grands philosophes athées avaient des blessures avec leur père. Ils étaient incapables de croire en un « père céleste » qui se ferait appeler Dieu. Ce n’est pas leur philosophie qui les a rendus athées mais leur histoire personnelle. Ensuite, ils ont construit un système rationnel pour justifier ce choix.

2- Lors d’une journée de formation pour le clergé, l’intervenant nous avait fait voir que parmi les familles où un seul parent a la foi et qui réussissent à transmettre cette foi aux enfants, dans 75% de ces familles le parent qui avait la foi était le père. Autrement dit, quand c’est la mère seule qui transmet la foi sans le père, la réussite est beaucoup plus rare. Seulement ¼ des réussites présentent ce cas de figure.

3- La religion juive est connue dans le monde entier pour son énorme réussite dans la transmission de la foi au sein de la famille. Or, dans cette religion, les ¾ de la liturgie ne se passent pas dans la synagogue mais à dans la maison, et le rôle du père de famille c’est d’être comme un prêtre domestique qui préside la liturgie familiale et béni les enfants au nom de Dieu.

Pour expliquer ces constats étonnants, j’utiliserai une histoire amusante :

Dans un village de Provence, monsieur le curé devait faire une homélie sur « science et foi ». Il commença son homélie en disant « j’ai devant moi la famille DUPONT : maman, papa et les enfants. Que ce enfants sont les enfants de madame DUPONT, ceci s’appelle la science. Que ces enfants soient les enfants de monsieur DUPONT, ceci s’appelle la foi ! »

Tout à l’heure, j’ai dénoncé l’infidélité des hommes. Le but de cette histoire n’est pas de dénoncer celle des femmes, mais de pointer le doigt sur le fait que la paternité est un acte de foi. Le premier acte de foi de tout être humain consiste à s’attacher à un homme qui dit être son père alors qu’il pourrait très bien ne pas l’être. L’enfant a passé 9 mois dans le sein de sa mère, il a été nourri de son lait. Il reconnaîtrait l’odeur de sa mère entre 1000 femmes. Tout son corps sait qu’il vient d’elle. Mais si l’enfant et le papa s’attachent c’est parce que les deux ont foi dans la parole de la mère qui dit être fidèle, alors qu’elle aurait pu avoir l’enfant avec un autre homme et personne ne le saurait.

L’expérience de la paternité a un côté ingrat. Un homme peut être père et ne pas le savoir. Cette expérience est plus intellectuelle que l’expérience de la maternité. On a besoin de renfoncer le concept de paternité pour ressentir l’appartenance que cela représente.

C’est pour rendre plus palpable cette filiation abstraite, que les sociétés patriarcales ont inventé, au fil des siècles, des transmissions symboliques liées à la paternité : le nom de famille, l’héritage, les titres de noblesse... l’homme a besoin de créer un univers symbolique pour reconnaître son enfant. La famille, avec tout son univers symbolique, est la cellule de base de toute société humaine, et aussi notre plus grande différence avec les animaux. Les êtres humains peuvent faire l’expérience de la paternité et de la famille, parce qu’ils ont la capacité de rajouter une valeur symbolique aux données de la nature.

Enfin, nous touchons du doigt, la raison pour laquelle la 1ère personne de la Trinité s’appelle « Dieu le Père » et ne pas « Dieu la mère », ce qui n’est pas le cas dans les religions qui adorent la « déesse nature ». Dieu n’a pas de sexe ! il est père et mère à la fois. Mais c’est vrai que nous croyons en un Dieu transcendant, en un créateur qui est au-delà de sa création. L’expérience que nous faisons d’être ses enfants, ressemble plus à l’expérience d’être fils d’un père, qu’à l’expérience de fils d’une mère. Elle n’est pas palpable, elle est un acte de foi. Comme un enfant s’attache à son père parce qu’il a foi dans la parole de sa mère, nous nous reconnaissons fils de Dieu parce que nous croyons à la parole de notre mère, l’Église.

Autrement dit, le développement de la foi chez un enfant, dépend énormément de la qualité de relation qu’il a envers son père et de l’autorité spirituelle qu’il lui reconnaît. D’où, l’urgence pour un père de famille chrétienne, de prier avec ses enfants et de les bénir afin de leur faire ressentir intuitivement à quoi ressemble leur Père du Ciel.

Pour conclure, je ne prétends pas qu’il faille revenir aux anciens modèles de famille. Je ne sais pas quelle est la solution pour tant de drames. Mais je suis persuadé que saint Joseph est une figure prophétique pour notre époque. Jésus, le Fils de Dieu fait homme, a voulu que ce soit un homme pécheur qui lui apprenne à prier son Père.

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