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  • David Homedes

Homélie sur le célibat sacerdotal



Dans la première lecture et dans l’évangile d’aujourd’hui les prêtres s’en prennent plein la figure ! Le sujet est de brulante actualité car les médias nous parlent souvent d’un certain nombre de prêtres qui ont mal tourné. A vrai dire, il ne s’agit pas du même péché qui est évoqué dans l’évangile, mais quand même. A croire à leurs statistiques, il y aurait eu un pic de prêtres qui ont mal tourné dans les décennies suivantes à mai 68. Concrètement, dans ce qui concerne le célibat sacerdotal, beaucoup de chrétiens le considèrent comme un idéal impossible ou même comme un mensonge. Du coup, ce sera le sujet de cette homélie.


Jésus lui-même dit à propos des autorités religieuses de son époque qu’ils ne remuent pas du doigt les fardeaux qu’ils imposent aux gens, qu’il faut faire ce qu’ils ne disent pas ce qu’ils font. Cette parole pourrait s’appliquer aux prêtres qui font la morale aux autres mais qui mènent une double vie en cachète. C’est vrai que St Vincent de Paul, au 17ème siècle disait déjà que tous les maux de l’Église viennent des prêtres.


Ça ne vaut pas dire qu’ils sont pires que les autres mais, à cause de l’autorité spirituelle qu’on leur accorde, leurs incohérences sont plus scandaleuses « parce qu’ils disent et ne font pas ». Jésus a chargé les prêtres de prêcher la sainteté alors qu’ils ne sont pas encore des saints, même s’ils aimeraient l’être. Si nous attendons à être exemplaires dans tous les domaines pour prêcher nous ne prêcherons jamais. Donc il y aura toujours un décalage entre notre réalité présente et l’idéal que souhaitons pour vous et pour nous-mêmes. Nous ne nous prêchons pas nous-mêmes, nous vous prêchons Jésus.


Le mois dernier est paru un très beau film qui s’appelle « sacerdoce ». J’ai constaté que les scènes du film qui marquent le plus les gens, ce sont celles où il est question de leurs fragilités, de leurs tentations, de leurs crises et découragements, et ne pas les scènes qui montrent leurs belles œuvres caritatives et missionnaires. J’ai l’impression que le peuple de Dieu attend une parole sur leurs fragilités. Il y a des chrétiens qui ne croient pas que le célibat soit possible pour un homme. D’autres, y croient mais ils s’imaginent les prêtres comme des hommes à part qui ont fait un choix héroïque et qui vivent dans une frustration permanente. Les uns et les autres oublient un détail qui n’est pas des moindres :


Aujourd’hui je voudrais dire aux uns et aux autres, que je suis heureux !!! Personne ne m’a imposé le célibat, je l’ai choisi librement par amour avant même de savoir que Dieu m’appelait au sacerdoce. Je suis un homme attiré par les femmes comme tant d'autres, mais le jour où Dieu m’a fait ressentir son amour j’ai constaté qu’il pouvait combler mon cœur. Je ne doute pas que Dieu puisse aimer la plupart des gens à travers leur conjoint, mais dans mon cas, je ressentais un besoin d’amour d’aimer Dieu en exclusivité. Plus exactement, je voulais épouser l’Église comme Jésus. Je ne voulais pas être un père de famille qui se dévoue pour les siens et qui s’investit dans sa paroisse le temps qui lui reste. Je ne voulais pas que vous soyez mon loisir du weekend ni mon gagne-pain, je voulais me vouer entièrement à la paroisse que Dieu me confierait comme un homme se dévoue pour son épouse, que ma paroisse soit l’épouse pour laquelle je donne ma vie. C’est ce que Jésus a fait pour l’Église toute entière, et moi pour le morceau d’Église qui m’est confié.


Bien sûr que j’ai aussi des moments de tentation qui sont très frustrants mais je n’ai jamais regretté mon choix. Peut-être un jour je traverserai des crises et des moments de découragement que je ne soupçonne même pas aujourd’hui, mais qui n’en a jamais eu ? Quel homme, marié ou pas, peut nous assurer qu’il n’a jamais été tenté ? La croix est présente dans toutes les vocations.


Ma page préférée de la bible, le premier chapitre de la lettre aux corinthiens, dit que Dieu ne choisit pas les meilleurs mais qu’il rend capables, ceux qu’il choisit, de vivre selon la sagesse de la croix que le monde ne peut pas comprendre. Le chapitre 5 de la lettre aux hébreux dit, en somme, que Dieu choisit ses prêtres parmi les hommes de chaque génération et que le prêtre est solidaire des faiblesses des hommes de sa génération. Plus exactement, il dit que le prêtre peut comprendre et accompagner les pécheurs dans leur chemin de conversion parce que lui-même doit aussi demander pardon tous les jours pour ses propres péchés.


Pour revenir au sujet du célibat consacré, notre époque se caractérise par une très forte érotisation de la société. Aujourd’hui il y a une telle promotion de la perversion que bientôt il sera presque héroïque de se contenter d’une vie de couple normale et saine. Dieu choisit ses prêtres parmi ces hommes qui sont fragilisés par le contexte social et familial dans lequel ils ont grandi. Il n’est pas étonnant qu’on trouve parmi les prêtres les mêmes tentations qu’on trouve chez les autres hommes de leur génération. Certains résistent, d’autres succombent quelques fois à des péchés plus ou moins honteux, et d’autres succombent souvent. Si la société continue à se dégrader moralement, il est fort probable que d'autres prêtres se fassent entrainer. Puisqu'il y a de plus en plus de maris infidèles ce n'est pas étonnant qu'il y ait, en proportion, de plus en plus de prêtres infidèles aussi. Nous ne sommes pas au bout de nos peines!


Pourtant, même quand un prêtre quitte le ministère ou quand une accusation de double vie s’avère être fondée, il ne faut pas imaginer que ce prêtre vous mentait lorsqu'il vous prêchait la morale chrétienne. Probablement, il désirait cette cohérence plus que tout et il en souffrait de ne pas y arriver.


C’est vrai que ce n’est pas le cas de tous ceux qui tombent. Certains ont vraiment été plus que malhonnêtes. Il est arrivé, surtout dans les années 70 et 80, que beaucoup de prêtres se découragent vraiment et cessent de lutter pour la sainteté. C’était la génération qui avait fait leur séminaire dans un monde chrétien et qui après l’Ordination se sont retrouvés à gérer une église en crise dans un monde déchristianisé et érotisé pour lequel ils n’étaient pas prêts. Parmi eux, la plupart sont partis, certains sont restés en cherchant des compensations plus ou moins légitimes, plus ou moins honteuses, et d’autres ont donné le meilleur d’eux-mêmes comme ils ont pu.


On pourrait conclure que les prêtres sont avant tout des chrétiens comme les autres, qui se battent avec les mêmes tentations que les autres, qui veulent être saints mais qui « galèrent » comme tout le monde, et que nous avons eu tort de les idéaliser ou de les diaboliser. Certains attendent du synode en cours, que la nouvelle église synodale soit plus démocratique, moins hiérarchique. Autrement dit, qu’on arrête de donner tant d’autorité à des hommes pécheurs. Si le prêtre n’est ni meilleur ni pire que les autres, évitons les systèmes pyramidaux qui sont à porte ouverte aux abus d’autorité quand la tête n’est pas sainte.


Il y a des diocèses et des communautés nouvelles qui fonctionnent d’une façon non cléricale où les responsabilités non strictement sacerdotales sont confiés à des laïcs. C’est vrai qu’il faut finir avec le cléricalisme qui attribue aux prêtres tous les charismes. Mais attention, car l’opposé du cléricalisme peut connaître d’autres excès : le danger de réduire le prêtre à un simple distributeur de sacrements.


Surtout dans les pays au nord de la France, il y a des diocèses où le prêtre doit soumettre toutes les décisions à son équipe d’animation pastorale mais cela bloque la transformation pastorale. Le problème c’est que le conseil n’est pas entièrement composé par des personnes qui ont tout quitté pour suivre le Christ, qui ont fait un bac + 5 en théologie, qui ont vécu dans un séminaire pendant 6 ans avec une vie de prière riche, avec les exigences de l’obéissance et de la vie en communauté, en faisant des point réguliers avec un père spirituel... bref, des personnes qui ne sont pas toujours assez formées pour mesurer tous les enjeux pastoraux et tous les dangers idéologiques. Si l’Église devenait démocratique ce serait la monté au pouvoir de tous les lobbies.


Chez les orthodoxes les prêtres ne peuvent pas se marier non plus, mais les hommes mariés peuvent devenir prêtres. Et justement, cela entraine un rapport au sacerdoce tout à fait différent du nôtre. Pour eux, ce sont les moines qui ont une paternité spirituelle, c’est eux qui sont sollicités pour l’accompagnement spirituel et c’est eux-seuls qui peuvent devenir évêques. Les prêtres mariés ne sont pas perçus comme des bergers d’âmes mais comme des savants qui animent la prière liturgique du weekend quand on n’a rien de mieux. Les gens qui veulent être saints sentent une différence considérable entre l’homme qui a tout quitté pour suivre le Christ et l’homme qui mène le même genre de vie que les autres.


Si on renonçait au célibat, on aurait peut-être plus de prêtres mais on n’aurait pas plus de gens qui ont tout quitté pour servir l’Église, or, c’est de cela que les chrétiens ont besoin. Vous avez le droit, que le berger de vos âmes soit quelqu’un qui a donné sa vie pour cela, et ne pas quelqu’un qui fait cela dans son temps libre ou qui fait cela pour nourrir sa femme et ses enfants! Dans les religions où l’homme d’autorité spirituelle a une famille à nourrir, il peut arriver que cet homme perde la foi mais continue à prêcher la bonne parole à laquelle il n’y croit plus, tout simplement parce que c’est le gagne-pain de sa famille.


Si on renonçait au célibat, il y aurait une augmentation exponentielle de prêtres qui nous mentent alors que c’est cela qu’on voulait éradiquer. Le pape François s’est plaint il y a un certain temps que le clergé est infiltré par des lobbies. Si on n’avait plus le filtre du célibat, je ne peux même pas imaginer à quoi on ouvrira la porte.


Conclusion : tous les prêtres, saints ou pécheurs, ont en commun, d’avoir tout quitté pour le Christ, pour se donner aux autres à temps plein, d’avoir été formés pendant 6 à 8 ans, d’avoir vécu en communauté avec d’autres candidats et des formateurs dans un séminaire qui a son propre filtre et qui est conçu pour qu’ils se construisent humainement et spirituellement. Enfin, ils ont en commun d’avoir reçu par le Sacrement de l’Ordre toute la Grâce dont ils ont besoin pour leur mission.


Alors, qu’ils soient des saints ou des pécheurs, Dieu se sert d’eux pour nourrir la vie spirituelle des âmes qu’il leur confie. Si les médias ne parlent pas de tous ses prêtres qui se donnent jour et nuit pour Dieu et pour leurs frères, c’est parce qu’il y en a tellement, que les médias n’en finiraient jamais d’en parler !!!


Mais priez pour vos prêtres, car il n’est pas facile d’être prêtre à notre époque. Dans le monde il y a des milliers de bons prêtres qui essayent de donner le meilleur d’eux-mêmes et qui essayent de vivre cohérents avec leurs engagements, mais ce n'est pas suffisant. Ce dont le monde a besoin, ce n’est pas de prêtres bons mais de prêtres vraiment saints, qui se donnent jusqu’à la folie, jusqu’à la mort. Demandons au Seigneur ne pas des prêtres mais des saints prêtres.


Je comprends que le célibat soit incompréhensible pour des gens qui n’ont jamais ressenti l’amour de Dieu dans leur cœur. Pour ma part, je constate que le Dieu des chrétiens est le seul qui peut combler le cœur d’un homme, et je ne suis pas intéressé par un Dieu qui ne soit pas capable de combler le cœur d’un homme. Laissez-moi terminer avec ces mots de la 2ème lecture, où Paul décrit mes aspirations vocationnelles au chapitre 2 de la lettre aux tessalonissiens :


« Frères, nous avons été pleins de douceur avec vous, comme une mère qui entoure de soins ses nourrissons. Ayant pour vous une telle affection, nous aurions voulu vous donner non seulement l’Évangile de Dieu, mais jusqu’à nos propres vies ! »



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